Qualité de l’air, gestion de l’eau, minoration des impacts environnementaux liés à l’activité portuaire, etc., les défis à relever sont multiples lorsqu’il s’agit de proposer aux populations de nos villes portuaires un cadre de vie de qualité et de préserver leur santé comme le recommande l’objectif 9 de l’Agenda 2030 de l’AIVP.
Le groupe Suez est l’un des signataires de cet agenda AIVP. Plusieurs de nos objectifs entrent en effet pleinement dans son champ d’actions. Suez a en particulier développé différents projets et participe à des initiatives très pertinentes pour mettre concrètement en œuvre cet objectif 9. Nous avons dès lors souhaité nous entretenir avec eux pour que SUEZ nous fasse part de son point de vue et de ses solutions innovantes pour répondre aux enjeux et défis que posent cet objectif 9.
SUEZ est membre de l’AIVP depuis 2013
AIVP – Le développement de marinas est souvent programmé dans les opérations de réaménagements des waterfronts. Votre filiale, la Société Marinov, développe notamment des solutions pour protéger l’environnement dans les ports de plaisance. Quelles sont-elles ? Et sont–elles pour partie transposables dans les ports de marchandises maritimes ou fluviaux ?
Gerald de Maleville, Directeur du Développement Délégué, Marchés Parapublics, SUEZ – SUEZ et sa filiale Marinov sont particulièrement engagés dans la préservation de l’environnement portuaire et dans l’évolution de la relation entre le port et la ville. Pour cela, SUEZ propose des réponses concrètes aux enjeux du développement durable des territoires et aux nouvelles attentes des utilisateurs des ports (riverains, professionnels, touristes). Notre volonté est aussi d’intégrer ces solutions et ces aménagements pour faire de véritables les lieux de vie. Le projet « Presqu’Ile en Seine » avec ses trois ports de plaisance à l’aval de Paris, illustre cette nouvelle dynamique pour le développement d’infrastructures et de services à destination de tous (utilisateurs et grand public).
SUEZ et Marinov accompagnent les collectivités et établissements publics dans la gestion et la protection de l’environnement avec des solutions dédiées et performantes. Cela peut être au travers de la réalisation de diagnostics environnementaux des ports et des zones littorales, ou par la surveillance de la qualité des milieux aquatiques (GenSpot, impact pluvial, modélisation, monitoring en temps réel, …). Nous intervenons également pour des actions de dépollution et de nettoyage des plans d’eau, y compris lors de situations d’urgence et de crise. Par ailleurs la restauration de la biodiversité est également l’une de nos propositions avec notamment l’installation d’habitats artificiels sur des ouvrages maritimes pour héberger des nurseries de poissons (solution ReFISH®, solution CYSTORE™).
Ces solutions concernent les baies portuaires dans leur ensemble, au-delà des ports de plaisance.
AIVP – Vos projets en faveur de la qualité de l’eau et de la protection de l’environnement, tels que ceux que vous avez menés à Bordeaux ou bien à Marseille, sont souvent complexes de par leur échelle territoriale. Ils impliquent une multiplicité d’acteurs comme c’est généralement le cas dans les villes portuaires. Dès lors comment les villes portuaires peuvent-elles anticiper le risque et optimiser en amont la protection de l’environnement ?
Gerald de Maleville, SUEZ – A mon sens, une approche « smart » faisant largement appel aux technologies de l’information permet d’apporter des réponses pertinentes. A Marseille, au travers du Service d’Assainissement Marseille Métropole (SERAMM), SUEZ collecte et traite 150 millions de m3 par an d’eaux usées et pluviales. Protéger le littoral et l’environnement est le cœur de métier de l’assainissement des eaux usées. Dans cette ville portuaire, pour assurer cette mission, SERAMM participe activement à la construction d’une ville intelligente, une smart city littorale de référence. SERAMM va construire le premier service d’assainissement en France qui gèrera, en temps réel et simultanément, les infrastructures d’assainissement terrestres et l’impact sur l’environnement et les milieux marins récepteurs. Ces systèmes comportent des modèles prédictifs simulant les écoulements en réseau et les rejets à partir d’information météorologiques et ils peuvent aller jusqu’à des prévisions d’état sanitaire des eaux de baignade.
Avec 50 km de littoral, Marseille dispose du plus grand parc balnéaire urbain européen. Des démarches innovantes sont mises en œuvre pour le suivi de la qualité des eaux de baignade et l’information des usagers. Des outils permettent de détecter le plus vite possible un risque de dépassement des seuils en prenant en compte des données météorologiques. En complément de ces prévisions en temps réel, des prélèvements d’eau de mer sont analysés avec la méthode GEN SPOT® afin d’obtenir des résultats bactériologiques en moins de 3 heures. Un gain de temps qui peut parfois éviter aux autorités compétentes de fermer inutilement leurs plages ou, en cas de fermeture, de rouvrir rapidement le site de baignade. L’application Marseille Infos Plages permet aux usagers de connaître en consultant leur smartphone les conditions de baignade en temps réel sur les 21 plages marseillaises.
AIVP – Vous êtes partenaire du projet « Dunkerque, l’énergie créative », un projet de la Communauté urbaine de Dunkerque (également membre de l’AIVP) retenu par l’Etat français en 2019 suite à l’appel à projet « Territoire d’innovation ». Vous y intervenez plus spécifiquement sur le volet qualité de l’air. D’une manière plus générale, au-delà du cas dunkerquois, le territoire Ville – Port présente-t-il des caractéristiques spécifiques concernant cette problématique de l’air ? Et quelles solutions peuvent y être imaginées pour y répondre ?
Nicolas Prego, Directeur technique et marketing – Smart & resourceful cities,
Directeur du projet SUEZ – « Dunkerque, l’Energie créative » –
Effectivement, la Communauté Urbaine de Dunkerque, emmenée par son Président Patrice Vergriete, ainsi que la Communauté de communes des Hauts de Flandre, ont obtenu le soutien de l’Etat, suite à l’appel à projet Territoire d’innovation, pour mener à bien un projet très ambitieux de transformation profonde de son territoire à l’horizon 2030. Celui-ci s’ancre sur la mise en place d’une symbiose territoriale pour incarner l’industrie, le port et la ville du futur, au travers de 4 axes stratégiques : la qualité de l’air, l’écologie industrielle et territoriale, la transition énergétique et l’intelligence territoriale.
J’insiste sur le fait que ce projet n’aurait pu se faire sans un important travail de co-construction mené avec l’ensemble des partenaires présents sur le Dunkerquois : les collectivités et les partenaires publics (dont le Grand Port Maritime de Dunkerque), les partenaires économiques et industriels dont SUEZ, les universités et les laboratoires de recherche (Université du Littoral-Côte d’Opale, CEA, …) et les associations, fédérations et autres organismes (Agence locale d’urbanisme, l’Observatoire de l’air « ATMO Hauts-De-France »).
SUEZ, acteur historique du Dunkerquois a accompagné, dès l’origine, le dossier de candidature. Le Groupe Suez s’est largement impliqué dans la structuration du projet d’ensemble et l’animation de l’écosystème et s’est effectivement positionné plus particulièrement sur la problématique de la qualité de l’air. Deux actions – l’une portant sur les outils numériques d’aide à la décision, l’autre sur la mise en place de solutions opérationnelles de traitement et de valorisation des émissions polluantes – ont été élaborées et seront complétées par la mise en place d’un observatoire local de la santé.
AIVP – Parmi les solutions innovantes que vous développez, d’autres pourraient sans doute s’appliquer à certains des sous-objectifs de cet objectif 9 de l’Agenda AIVP. Je pense par exemple à votre action pour la redécouverte des fleuves. Pourriez-vous pour finir, nous citer quelques exemples concrets applicables spécifiquement aux villes portuaires ?
Gerald de Maleville, SUEZ – En effet, beaucoup de villes portuaires sont positionnées sur le cours ou à l’exutoire de grands fleuves qui sont partie intégrante des écosystèmes portuaires. Redécouvrir les fleuves est aujourd’hui un enjeu urbanistique majeur.
SUEZ intervient de plusieurs façons. Le transport fluvial des déchets est un premier sujet. Un convoi fluvial de 4000 tonnes permet d’éviter 200 camions de 20 tonnes, avec un fort impact en termes de qualité de l’air, de nuisances sonores et de saturation du trafic routier. Ces développements sont particulièrement importants dans le cas du projet du Grand Paris Express pour lequel nous avons mis en place une logistique sur plusieurs des premiers chantiers.
L’aménagement de berges est un autre exemple. Dans le cadre du grand projet urbain de l’Ile de Nantes, nous participons à la création d’un paysage végétalisé pour permettre aux usagers d’approcher au plus près les rives du fleuve. Autre exemple, toujours en France, à Pauillac, le réaménagement des quais du centre-ville a permis de créer un cheminement piéton et cyclable le long des berges, l’aménagement et la mise en valeur du port de plaisance. Enfin, améliorer la relation ville fleuve, c’est aussi préserver des inondations pour la sécurité des populations. SUEZ intervient depuis des études hydrauliques de bassin jusqu’à la mise en œuvre opérationnelle d’actions de désimperméabilisation des sols avec des solutions telles que Smart pluvial mise en œuvre à Douai.
Si SUEZ est peu présent dans les métiers du portuaire, nos compétences sur les thématiques environnementales et notre connaissance des territoires nous placent au cœur d’enjeux du port de demain. En effet, le fonctionnement des grands ports de commerce est indissociable des territoires dans lesquels ils s’insèrent, et la prise en compte de l’environnement ne peut plus être occultée. Les solutions SUEZ, fondées sur la performance environnementale et l’économie circulaire, sont proposées aux écosystèmes portuaires que nous abordons selon les différentes échelles du port, de la ville portuaire, et du fleuve. Schématiquement nous les classons en trois grands axes : contribuer à l’attractivité des ports, agir sur la qualité de vie des villes portuaires, et redonner vie aux fleuves.